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« Gouvernance »

Le président : toujours plus de pouvoir

Fiche LRU 10

vendredi 12 octobre 2007, par Webmestre

Le nouveau texte

Art. L712-2 :


- Éligibilité : « Le président est élu (…) parmi les enseignants-chercheurs, chercheurs, professeurs ou maîtres de
conférences, associés ou invités, ou tous autres personnels assimilés, sans condition de nationalité »
(et non
plus : « parmi les enseignants-chercheurs permanents, en exercice dans l’université, et de nationalité française »).
- Élection :« à la majorité absolue des membres élus du CA » (et non plus : « par l’ensemble des membres des 3
conseils réunis en une assemblée, à la majorité absolue des membres de celle-ci »
).
- Durée du mandat : 4 ans, renouvelable une fois (et non plus : 5 ans, non rééligible dans les 5 ans qui suivent…).
- Droit de veto : « sous réserve des dispositions statutaires relatives à la première affectation des personnels
recrutés par concours national d’agrégation de l’enseignement supérieur, aucune affectation ne peut être
prononcée si le président émet un avis défavorable motivé »
(disposition nouvelle).
- Délégation de signature : aux possibilités précédentes (V.P des 3 conseils, SG, directeurs des composantes et des
services communs) viennent s’ajouter : les membres du bureau âgés de plus de 18 ans et les agents de catégorie A placés sous son autorité.

Art. L 712-3, L 712-5, L 712-6 :

Comme précédemment, le Président préside chacun des 3 conseils. Mais « le nombre des membres du conseil est
augmenté d’une unité lorsque le président est choisi hors du conseil »
. De plus : « en cas de partage égal des
voix, le président a voix prépondérante »
.

Art. L 952-6-1 :

Comité de sélection (devant remplacer, d’ici le 11/8/08, la Commission de spécialistes pour le recrutement des
enseignants-chercheurs) : « ses membres sont proposés par le président et nommés par le CA en formation
restreinte »

Art. L 954-2 et L 954-3 :

Dans le cadre des dispositions applicables aux universités bénéficiant de responsabilités et de compétences
élargies
, le président :
- « est responsable de l’attribution des primes aux personnels qui sont affectés à l’établissement »
- « peut recruter, pour une durée déterminée ou indéterminée, des agents contractuels (…)

  1. Pour occuper des fonctions techniques ou administratives correspondant à des emplois de
    catégorie A
  2. Pour assurer, par dérogation au premier alinéa de l’article L. 952-6, des fonctions d’enseignement,
    de recherche ou d’enseignement et de recherche, après avis du comité de sélection prévu à l’article L. 952-6-1. »

Art. 13 de la loi LRU (hors Code de l’Education) :

« Les présidents d’université peuvent rester en fonction jusqu’au 31 août suivant la date à laquelle ils ont atteint
l’âge de 68 ans »

Art. 43 de la loi LRU (disposition transitoire) :

« Les présidents en fonction (…) dont le mandat expire avant la date fixée pour l’élection des membres du CA
sont maintenus en fonction jusqu’à cette date. Lorsque la durée de leur mandat restant à courir est supérieure à
6 mois, à la date de l’élection du nouveau CA, les présidents restent en fonction jusqu’au terme de leur mandat
(…). Au terme de leur mandat, de nouveaux présidents sont élus, dont le mandat prend fin avec celui du
CA… »

Comprendre la réforme

Droit de veto, renouvèlement du mandat, élévation
de la limite d’âge, voix prépondérante dans les 3
conseils… Inspirées par la CPU, la quasi-totalité de
ces dispositions va dans le sens d’une augmentation
considérable du pouvoir présidentiel dans les
universités, à l’instar du PDG des entreprises
privées.

En particulier, le président aura la haute-main sur
les recrutements d’enseignants-chercheurs : pour
chaque concours, tous les membres des comités de
sélection seront désignés par lui ; si cependant le
résultat ne lui convient pas, il aura un droit de veto ;
idem pour l’affectation des enseignants du second
degré. En ce qui concerne les enseignants ou
enseignants-chercheurs contractuels, c’est encore
plus simple : c’est le président qui les recrutera,
après un simple avis (qu’il n’est pas tenu de suivre)
du comité de sélection.

C’est aussi le président qui attribuera les primes
aux personnels, suivant des critères établis par le
CA.

NB : Le droit de veto du président, instauré par
l’article L 712-2, est calqué sur celui des directeurs
de composante « article L 713-9 », mais il ne s’y
substitue pas : il y aura désormais deux vetos
possibles pour toute affectation de personnel dans
un IUT ou une école interne.

Le président sera désormais élu par un corps
électoral singulièrement réduit : de 13 à 22 « grands
électeurs », contre 70 à 140 précédemment. La
coïncidence de son mandat avec celui du CA
tendra, dans la pratique, à subordonner le CA au
président qu’il aura élu. Et les dispositions
transitoires de l’article 43 de la loi du 10 août 2007
visent à assurer, pour tous les présidents
actuellement en fonction, la possibilité d’un double
mandat, de 8 voire de 9 ans.

Position du SNESUP

Le SNESUP est favorable à un président
démocratiquement élu, responsable devant le CA,
mandaté par celui-ci devant le ministère, et plus
généralement porteur des aspirations et
revendications de la collectivité qu’il représente.

Cette conception implique que le président soit lui-même
membre de cette collectivité : or la nouvelle
loi permettra de le choisir à l’extérieur de
l’établissement, voire même dans le secteur privé
s’il s’agit d’un enseignant-chercheur associée ou
invité.

Le SNESUP est opposé à la conception
managériale du rôle du président, qui imprègne le
nouveau texte. Il est donc favorable à une rotation
rapide du mandat présidentiel et défavorable au
renouvèlement de ce mandat.

Déjà opposé au droit de véto des directeurs d’IUT
et d’écoles internes, dans le cadre de l’article L713-9, le SNESUP dénonce avec force celui des
présidents, introduit par le nouvel article L 712-2.
Cette disposition, ainsi que celles, décrites ci-dessus,
des articles L 952-6-1 et L954-3, consacrent
l’ingérence des chefs d’établissement dans le
recrutement des personnels, en contradiction avec
le principe fondateur de la fonction publique, d’un
recrutement par concours assuré par des jurys
indépendants.

Pistes pour l’action

Construire l’abrogation de la loi Pécresse, c’est
pour le SNESUP un objectif majeur. Pour cela, il
faut faire en sorte que ses dispositions les plus
nocives et les plus emblématiques ne s’appliquent
pas. Cela implique d’occuper, dans toute la mesure
du possible, le terrain des élections aux nouveaux
conseils, en présentant un maximum de
candidats SNESUP sur des bases claires et
combatives.

Certes, en matière de pouvoirs présidentiels, le
texte de loi n’offre guère de failles ou d’ambiguïtés
à exploiter. Cependant, on peut faire élire un
président qui s’engage à ne pas utiliser son droit de
véto, on peut inscrire la parité A/B pour les comités
de sélection dans les statuts de l’établissement, on
peut créer un "conseil d’établissement" plus large
que le CA et plus représentatif, donnant un avis sur
tous les points de l’ordre du jour du CA (voir fiche
7). Dans le cadre des nouveaux statuts, une
restriction à l’élection d’un contractuel, chef
d’entreprise ou enarque à la Présidence pourrait
être d’être titulaire d’un doctorat (condition non
nécessaire pour être PAST). Le renouvèlement du
président sortant n’est pas une obligation, et le CA
n’est plus tenu de le réélire s’il se représente…

Une vigilance toute particulière doit s’exercer dans
les conseils, pour bloquer l’application des
nouvelles dispositions dites « responsabilités et
compétences élargies » : il s’agit de rien de moins
que du budget global (voir fiche 4), du recrutement
des contractuels, des primes du personnel à la
disposition du président (voir articles L 954-2 et
L954-3 ci-dessus). Pendant un délai de 5 ans et
même au-delà, cela passe nécessairement par un
vote du CA, à la majorité absolu des membres en
exercice.

Soulignons que les nouvelles dispositions font
perdre au président une grand partie de sa légitimité
(élu à la majorité simple par un CA réduit où sont
majoritaires des élus enseignants désignés selon un
mode de scrutin injuste, éventuellement extérieur à
l’établissement) : ce sera utile quand il faudra
s’opposer à lui.


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