Pour une université démocratique

Accueil > Contributions > La fonction publique de Sarkozy : à rebours des valeurs républicaines

Le mensuel du SNESUP

La fonction publique de Sarkozy : à rebours des valeurs républicaines

N°557 octobre 2007

mardi 16 octobre 2007, par Gérard Aschieri

La fonction publique de Sarkozy rompt avec ce qui
s’est construit en matière de solidarités au profit
de la promotion de la concurrence. Face à une
probable réduction du champ des missions de
l’État, une riposte syndicale unitaire est nécessaire.

Entre le discours de Nantes sur la fonction
publique et celui prononcé la veille
au Sénat sur les questions sociales point
n’est besoin de test ADN pour voir les
liens de filiation ; la parenté est d’ailleurs
aussi visible avec la loi sur l’université ou
les annonces sur l’éducation : il s’agit dans
tous les cas d’une rupture avec ce qui
dans notre pays s’est construit en matière
de solidarités, de garanties collectives et de
droits, au profit de la promotion de la
concurrence, du chacun pour soi et de
l’individualisme forcené, le tout au nom
d’un « mérite » qui sert à masquer le poids
des inégalités sociales.

Derrière un discours qui s’affiche comme
une défense et illustration de la fonction
publique, les propos du président de la
République à Nantes sonnent le glas d’une
fonction publique au service de l’intérêt
général et tournent le dos aux principes
fondateurs de celle-ci.

Le non-remplacement programmé d’un
fonctionnaire sur deux, la casse des statuts,
la substitution de l’individualisme et de la
concurrence aux valeurs d’égalité, de solidarité
inscrites dans le statut et à la transparence
de gestion conquise par les personnels
grâce au paritarisme, tout cela
s’attaque directement aux garanties apportées
aux citoyens comme aux personnels
par le statut de la fonction publique et en
particulier celles de l’égalité de traitement,
de la qualification reconnue, de l’indépendance
par rapport aux intérêts particuliers.

Le Président confirme notamment que le
non-remplacement d’un fonctionnaire sur
deux ne sera rendu possible que par la
réduction du champ des missions de l’État.
Ainsi, « le rythme de diminution des
effectifs de l’éducation nationale sera fonction
des progrès réalisés dans la remise à
plat des programmes et des rythmes scolaires »
.
Dans ce cadre, le « pécule » proposé
aux fonctionnaires qui démissionneraient
renvoie explicitement à des
transformations majeures du service
public : on songe à ces plans sociaux où
l’on « dégraisse » en offrant une indemnité
de départ à ceux qui acceptent de s’en
aller de leur « plein gré » : la mobilité ainsi
proposée n’est pas une réponse aux
revendications des personnels — réponse
qui nécessiterait d’abord de la formation
— mais un moyen de réduire les effectifs
en douceur — ou plutôt en douce…

Aucune réponse n’est apportée à la dévalorisation
générale, aggravée par les
pertes de pouvoir d’achat du point d’indice
de la fonction publique de ces dernières
années. Loin de la reconstruction
de la grille et de la reconnaissance des
qualifications que nous réclamons, la
« revalorisation » des carrières telle que la
propose le président valorise l’individualisation
des rémunérations et prétend
la fonder sur la performance, poussant
ainsi à la concurrence entre
individus au lieu d’améliorer leur efficacité
collective. Il tourne le dos aux
besoins d’une fonction publique
moderne : qualifications reconnues, développement
du travail en équipe, formation,
initiale et continue améliorée…

La réponse des heures supplémentaires va
à contresens des besoins et des attentes.
Le président moins que quiconque
n’ignore que prétendre augmenter le pouvoir
d’achat par ce biais ne profitera qu’à
une minorité tout en mettant directement
en cause l’emploi des précaires et les
débouchés des étudiants.

Le recours à des emplois de droit privé est
un des éléments les plus emblématiques
du propos présidentiel avec une stratégie
insidieuse : substituer progressivement le
contrat individuel au statut. La disparition
des corps laisse entrevoir la volonté
de disposer de personnels dont la qualification
n’est plus un élément de la carrière,
avec notamment comme objectif
de faciliter les redéploiements. Elle ouvre
la porte à une gestion des personnels
selon la seule volonté de leur hiérarchie.
Loin d’être un carcan, les statuts sont les
garants de l’indépendance indispensable
du fonctionnaire vis-à-vis des éventuelles
pressions extérieures. Ils sont le cadre
dans lequel peut par exemple s’exercer
l’inventivité et la liberté pédagogique
des enseignants. Le pacte proposé par
Sarkozy ne saurait répondre aux attentes
des personnels ni aux besoins des usagers ; il représente au contraire un véritable
dynamitage des principes de la
fonction publique.

Tout cela nécessite une riposte syndicale : la FSU fait tout pour qu’elle soit la
plus unitaire possible.