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Intersyndicale Recherche

C’est en ce moment que se joue l’avenir des EPST et de leurs personnels.

mercredi 16 janvier 2008, par Webmestre

Après avoir annoncé et mis en œuvre la baisse de l’emploi public, prévu la remise en cause du statut de fonctionnaire, le gouvernement vient de refuser toute hausse du point d’indice, pour mettre en place des salaires individualisés, avec des primes pour quelques uns. Nicolas Sarkozy nous l’a annoncé dans ses voeux de nouvel an, il s’agit de changer de civilisation. L’enseignement supérieur et la recherche ne sont pas épargnés.

Ils ont d’ailleurs été dans la ligne de mire dans les premiers. Les orientations mises en oeuvre à la fois dans le Pacte pour la Recherche, initié par F. Goulard, et dans la loi Libertés et Responsabilité des Universités, promulguée par V. Pécresse, ne sont pas anodines. Via notamment le financement sur projets par appels d’offres de l’ANR, elles mettent en concurrence les équipes de recherche, court-circuitent le rôle des organismes nationaux et centralisent le pilotage de la recherche directement au niveau du gouvernement. Elles cassent les garanties statutaires en accélérant le développement de la précarité et de l’individualisation des rémunérations.

Il n’y a jamais de négociation

Sur l’organisation de la recherche, sur les jeunes chercheurs comme sur les statuts des personnels, il n’y a aucune négociation avec les organisations syndicales. La ministre n’a mis en place que des commissions qui auditionnent des personnalités et parfois les syndicats ; elle pioche dans leurs conclusions ce qui l’intéresse. Cette méthode est inadmissible.

Attaques contre les EPST et mise en concurrence généralisée

La recherche publique française est organisée depuis de longues années sur l’existence conjointe de trois institutions, les universités, les EPST et les EPIC. Cette organisation spécifique n’est pas synonyme d’isolement. Au contraire de nombreux partenariats se sont noués et ont contribué à l’enrichissement mutuel. Dans une période où sans beaucoup de moyens nouveaux, les universités ont dû faire face à la massification de l’enseignement supérieur, c’est notamment grâce au partenariat entre les universités et les organismes que les laboratoires ont pu garder leur rang dans la recherche internationale.

Le caractère national des EPST leur permet de couvrir l’ensemble des thématiques, garantit le maintien d’une recherche fondamentale de haut niveau et d’une recherche finalisée d’intérêt public, ainsi qu’une expertise indépendante et la capacité de faire face aux crises technologiques ou sanitaires. Il doit être préservé. Les EPST, notamment le CNRS, et les universités ont des rôles et des responsabilités communs et complémentaires. Le partenariat, entre les institutions passe souvent par la cotutelle des unités de recherche entre les EPST et les universités. Elle doit se poursuivre.

Les laboratoires, qu’ils soient mixtes ou propres (aux EPST ou aux universités), se retrouvent seuls face à l’ANR, gigantesque agence de financement sous contrôle étroit du ministère, face aux industriels et aux pouvoirs politiques locaux. Ils sont seuls face à l’évaluation faite par une agence ministérielle, l’AERES qui fonctionne sans aucun élu, qui impose ses critères sans s’appuyer sur les instances d’évaluation (Comité national, etc.) au risque de privilégier la bibliométrie et la capacité de répondre aux appels d’offre de l’ANR et aux seules sollicitations des industriels. Rappelons que la loi prévoyait que L’AERES pouvait s’appuyer sur les instances existantes, ce qui n’ a pas été le cas. Dans un contexte où toutes ces institutions ne visent que le maintien de la compétitivité économique ou bien la recherche à tout prix d’un label international, maintenir le cap d’un véritable service public de recherche au service de la population, à la fois sur le plan de la recherche fondamentale et de la recherche finalisée à vocation non-marchande, sera une gageure difficile.

Le Pacte pour la Recherche de Goulard et la LRU de Pécresse organisent la concurrence entre les laboratoires et entre les universités. Quatorze PRES et universités délivrent 70% des thèses : que feront les autres ? Toutes les universités, comme les EPST doivent avoir les moyens financiers de mener une réelle politique scientifique. Cela passe par un relèvement significatif des crédits que l’Etat alloue aux EPST et aux universités. Sans cela, les laboratoires ne pourront pas maintenir leurs capacités, ils se transformeront en simples hôtels de projets de court terme, accueillant des équipes mises en concurrence. C’est inacceptable. Le risque est considérable de priver les scientifiques d’une liberté de recherche et d’initiative qu’ils ont dans tous les pays développés. Si l’Etat doit définir les grands choix, la politique scientifique doit être élaborée collectivement par les scientifiques, elle
ne doit pas être l’affaire des seuls technocrates au service des intérêts des grandes entreprises.

Les chantiers de Pécresse

Le chantier « jeunes chercheurs ». Pour répondre aux préoccupations concernant la situation — souvent précaire — des jeunes chercheurs, la ministre a demandé un rapport au CSRT. Le rapport rendu fin septembre est peu satisfaisant, et personne ne connaît la suite que la Ministre compte donner à ce "chantier". Nous exigeons de véritables négociations en vue d’obtenir :
- un contrat de travail de "chercheur en formation" couvrant la thèse et une courte période post-thèse
- le recrutement sur poste statutaire des jeunes chercheurs au plus près de la thèse, sans avoir à passer par la case "précarité"

La mission d’Aubert. Pour répondre aux inquiétudes des personnels des EPST, V. Pécresse a confié une mission à F. d’Aubert, ancien ministre. Cette mission ne traitera pas seulement de simplification administrative dans les UMR, mais aussi de recrutement, de gestion des personnels, d’évaluation etc. Beaucoup de choix sont repoussés fin mars 2008 après les conclusions du comité. Notre avenir ne peut pas dépendre d’un accord confidentiel entre une quinzaine de directeurs d’EPST et présidents d’université.

Le chantier « personnels ». Ce chantier de la LRU a été lancé le 18 décembre 2007. La composition de la commission nommée par la ministre laisse préjuger que l’on retrouvera des conclusions déjà écrites ailleurs par Belloc ou d’autres. Ainsi, ce chantier entendrait se limiter à la modulation des obligations de service des enseignants chercheurs, excluant les personnels des EPST. Nous exigeons l’ouverture de véritables négociations afin de répondre aux revendications d’amélioration des carrières, y compris dans les EPST. Il faut :
- réduire le service statutaire des enseignants pour leur permettre de faire de la recherche,
- garantir le statut de chercheur fonctionnaire à temps plein dans les EPST,
- faciliter les passerelles entre les métiers de la recherche et de l’enseignement supérieur.
- améliorer les carrières de toutes les catégories de personnels dans les universités et les EPST.
- relever le salaire d’embauche et prolonger les grilles en fin de carrière.
- reconnaître les qualifications et débloquer les promotions.

La mise en concurrence des équipes s’accompagne d’une montée générale de la précarité. Les financements de l’ANR ont créé des milliers de CDD. La LRU fera de même, en donnant la liberté aux présidents d’universités de recruter sous CDD et CDI. Les textes n’ont pas été écrits pour embaucher sur CDD quelques scientifiques étrangers de haut niveau. Ils l’ont été pour multiplier sans contrainte les hors statut pour l’enseignement, la recherche ainsi que pour les tâches administratives et techniques. Au budget 2008, aucun poste frais n’a été créé dans les universités et les EPST.
- Il faut résorber la précarité qui touche toutes les catégories de métiers dans les universités et les EPST.
- Il faut un plan pluriannuel de création d’emplois de titulaires.

La politique qu’est en train de mettre en place le gouvernement à marche forcée nous conduit droit dans le mur. Nous devons réagir. Une autre politique est possible, y compris en distribuant autrement les dépenses publiques. Imposons-la !

Les mois qui vont venir seront décisifs. Les organisations syndicales appellent les personnels à s’informer, à débattre, à se mobiliser. Le 24 janvier 2008 sera une nouvelle étape pour défendre nos salaires, avec l’ensemble de la fonction publique. Mais, nous appelons également à se mobiliser le 24 janvier pour imposer au gouvernement l’ouverture de vraies négociations pour la recherche, l’enseignement supérieur et leurs personnels.

Pour les salaires, l’emploi, les statuts, pour l’avenir de la recherche publique, le 24 janvier 2008, imposons un changement de cap !


Organisations signataires : CGT (SNTRS, CGT-INRA, FERC-Sup, UGICT), FSU (SNCS, SNESUP), SNPTES-UNSA, SUD-Recherche-EPST, SLR