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SNESUP

Un pseudo "plan licence" non concerté, sans emplois

jeudi 13 décembre 2007, par Webmestre

La Ministre V. Pécresse vient d’annoncer les mesures du "Plan
licence", sans réelle concertation avec l’ensemble de la
communauté universitaire, ni avec les organisations syndicales des
personnels enseignants, en ignorant le CNESER. Elle réagit à
contretemps à l’exigence d’un collectif budgétaire pour la
réussite en licence portée par le SNESUP à la rentrée 2007. Ce refus
de nous entendre en juillet sur cette question porte déjà un lourd
préjudice aux nouveaux bacheliers.

La Ministre essaie de présenter son objectif comme très ambitieux :
"diviser par deux et en cinq ans le taux d’échec à l’université", en
utilisant pour sa démonstration des chiffres fallacieux qui
dévalorisent le travail actuel des universitaires. Depuis de
nombreuses années, le SNESUP exige cette véritable priorité. Il
formule des propositions à ce sujet, en cohérence avec l’objectif
d’élévation générale des qualifications et de 50 % d’une classe d’âge
titulaire d’un diplôme de niveau licence. Si la ministre annonce une
augmentation sur cinq ans du budget de 500 M€ à 714 M€, elle n’annonce
aujourd’hui aucune création d’emploi statutaire.

Parmi les mesures annoncées, la transformation de la licence. Si la
conception de la première année développée par la ministre reste
floue, on peut craindre le développement de première année de
propédeutique. Or, nombre d’étudiants qui viennent à l’Université
cherchent autre chose qu’une super-terminale. De plus, une telle année
pourrait être utilisée pour mettre en place un processus de sélection.
L’entrée dans les études universitaires suppose une rupture
scientifiquement et pédagogiquement progressive avec les contenus et
les méthodes du lycée. Un modèle unique de première année
universitaire n’est pas le moyen de faire réussir plus d’étudiants. Le
SNESUP a défendu des projets bi-disciplinaires et pluridisciplinaires.
Quant aux seconde et troisième années, au cours desquelles la
spécialisation disciplinaire se ferait, elles seraient aussi
l’occasion d’une découverte du monde professionnel et d’un stage
validé dans le cursus pour tous les étudiants. Mais la question des
lieux, du contenu des stages et de leur encadrement est entière.
L’introduction de ces nouveaux enseignements permettant à l’étudiant
de préciser son projet professionnel ne doit pas se faire en
appauvrissant des contenus (disciplinaires ou pluri-disciplinaires)
des formations. Pour la mise en œuvre de cette nouvelle licence, est
proposé un Cahier des Charges National, qui a déjà été anticipé par
une circulaire de la DGES dans le cadre de la contractualisation de
la vague B et qui permettra le pilotage par le Ministère.

Certaines des mesures pédagogiques présentées étaient proposées depuis
plusieurs années par le Comité de suivi Licence (enseignant référent,
travail en petits groupes, tutorat), et nous y avions contribué. La
Ministre annonce 5 heures hebdomadaires supplémentaires en moyenne
par étudiant. C’est reconnaître que la mise en place du LMD, avec une
volonté de baisse des dépenses, avait considérablement diminué les
horaires de formation en licence. Mais les moyens supplémentaires du
budget 2008 (27,4 M€) représentent moins de 30 € par étudiant,
c’est-à-dire à peine une heure de TD ! Et les tuteurs ou les moniteurs
ne peuvent faire un travail réellement utile que s’ils sont encadrés
par des personnels titulaires. Nous ne pouvons accepter que soit
appliqué aux universitaires le « travailler plus pour gagner plus »
sous forme d’« heures complémentaires d’enseignement ». C’est
contradictoire avec l’exigence d’une activité de recherche soutenue !
Et cette proposition ignore la surcharge de travail actuelle des
personnels. Par ailleurs, l’on reviendrait à des « primes pédagogiques » pour les enseignants coordonnateurs (3 M€, soit un montant de 2000 €
pour les personnels concernés). Cela n’est pas non plus la
revalorisation des carrières et des salaires nécessaire pour tous.

D’autres mesures concernent l’orientation. Mais, la ministre n’invente
rien en proposant que l’université aille davantage à la rencontre des
bacheliers. C’est une pratique existant depuis de nombreuses années,
mais qui se heurte encore à l’absence de moyens en personnels
qualifiés (co-psy par exemple) et à l’absence de prise en compte de
ces activités dans le service des enseignants. Quant à la
ré-orientation au cours de la première année, elle a jusqu’ici fait
preuve de son inefficacité, les étudiants ne souhaitant pas changer si
rapidement d’orientation et l’organisation de l’année universitaire
étant différente d’une université à l’autre, d’un domaine à l’autre.

Enfin, la Ministre propose d’accorder la priorité aux bacheliers
technologiques en IUT et professionnels en BTS, ce qui passerait pour
les IUT par une incitation financière. Pour le SNESUP, cela ne saurait
se traduire pour les étudiants de baccalauréats technologiques par une
orientation obligatoire vers des filières courtes et le refus de
construire dès la licence des parcours de la réussite pour ces
étudiants leur permettant la poursuite en Master. Cela ne saurait se
traduire par une limitation de l’accueil des bacheliers généraux en
IUT, sauf à augmenter la part d’orientation par défaut en licence.

Ce dont les étudiants ont besoin pour réussir dès la première année de
Licence, c’est d’un enseignement en plus petits groupes, avec des
enseignants qualifiés pouvant mettre en place de nouvelles méthodes
pédagogiques. Cela nécessite donc des recrutements et une augmentation
du budget consacré aux activités pédagogiques. Cela nécessite donc des
actions de formation initiale et continue des personnels, et notamment
de formation pédagogique des enseignants.

La bataille du SNESUP pour la réussite des étudiants s’inscrit
totalement dans le mouvement amorcé contre une conception
technocratique, autocratique et concurrentielle des établissements
d’enseignement supérieur. Modifier et réorienter le budget, abroger
et, dans un premier temps, suspendre la loi LRU, c’est indispensable
pour les missions de recherche et de formation.